Aujourd’hui, une courageuse française a pris sa liberté – sa liberté de choisir où et quand sa vie s’arrêterait – elle qui se savait condamnée. Cette femme, c’est Anne Bert.
Souffrant de la maladie de Charcot, elle était condamnée à une mort prochaine et la maladie la paralysait petit à petit. Au fur et à mesure que ses muscles se rigidifiaient, son élan de courage se libérait pour faire entendre ce que bien de gens ne veulent pas entendre.
Pourtant aujourd’hui en apprenant sa mort, je me suis senti gêné.
Gêné en tant que français, citoyen de ce pays initiateur des droits de l’Homme et qui affiche le mot de Liberté dans sa devise sur nos bâtiments publics mais qui n’offre pas de solution digne à la souffrance incurable. Gêné une nouvelle fois de voir que notre pays n’a pas pu soutenir Anne dans son choix individuel et pris en toute conscience. Ne sommes-nous pas capables d’apporter des solutions dignes à ces femmes et ces hommes qui souffrent et vont, de fait, mourir prématurément ?
Je vois personnellement une différence avec le suicide assisté. Un acte suicidaire intervient suite à des problèmes psychologiques (plus ou moins profonds) mais pour lesquels le soutien, l’accompagnement et la thérapie peuvent permettre de guérir – le personnel médical doit être pleinement impliqué dans cette logique de guérison. En revanche, pour les maladies incurables et pour lesquels le patient souffre, lorsqu’il est acté, démonté et accepté que la seule fin possible est la mort, le personnel médical devrait pouvoir aider ces malades en souffrance en leur donner la liberté de choisir quand, où et avec qui ils partiront. Anne Bert a donc quitté la France et pris la liberté de faire ce choix, pour elle et pour ses proches, en Belgique. Chers parlementaires, ayez du courage, légiférez pour rendre de la dignité à ces hommes et ces femmes qui se savent condamnés à mourir mais n’ont d’autres solutions que d’attendre et de se sentir plonger peu à peu dans un quotidien de souffrance vers la mort certaine.
Anne, j’ose exprimer l’espoir que votre nom n’appartienne pas seulement au passé mais fasse réfléchir aujourd’hui et demain – aussi souvent que nous aurons l’occasion d’avancer sur le sujet de la dignité humaine.