Incendie des Monts d’Arrée

© THOMAS BREGARDIS / OUEST-FRANCE / MAXPPP

Menez-Are, Ma kalon !

Ayant grandi dans les Monts d’Arrée bien que natif de La Teste de Buch, c’est non sans une certaine émotion personnelle que j’ai vu brûler ces lieux ces derniers jours.
Je tiens tout d’abord, comme je l’ai fait auprès des autorités dès les premières heures de l’incendie, à renouveler mon soutien aux hommes et aux femmes qui se sont battus contre ces incendies. Tous, sans exception ni hiérarchie :

  • les pompiers du Finistère et les renforts des départements voisins,
  • les forces de l’ordre et les services de l’état,
  • les services du Parc Naturel Régional d’Armorique et du Conseil Départemental du Finistère (hélàs très injustement ciblés par des critiques sur leurs responsabilités),
  • les services et élus des communes touchées
  • et les nombreux agriculteurs et habitants qui ont aidé à maîtriser ces feux.

Des feux dans les Monts d’Arrée, il y en a toujours eu, il y en aura hélas toujours. J’avais 8 ans quand j’ai visité l’incendie de 1996 autour de la Montagne St Michel, et j’ai encore le souvenir du survol des Canadairs en 2010 non loin de ma maison. Les Monts d’Arrées portaient-ils encore il y a quelques jours les traces de ces épisodes passés ? Très peu. En effet, zone naturelle exceptionnelle dont la végétation et le relief sont sans pareil dans notre département, les Monts d’Arrée sont majoritairement composés de landes, de roches, d’arbustes et de quelques forêts. Les incendies passés ont détruit des pans majeurs de cette végétation avec un impact immédiat – bien que ponctuel – sur la biodiversité. Néanmoins, sans action humaine majeure, la nature a su reprendre naturellement ses droits : sans déséquilibre structurel et avec un retour progressif de biodiversité. 


Je salue tout particulièrement l’action des agriculteurs du secteur qui, en proximité immédiate des incendies, se sont mobilisés dans un élan de solidarité pour aider à l’action des pompiers. C’est justement parce qu’il existe des agriculteurs dans les Monts d’Arrée que cette action a pu s’organiser de manière efficace. Maillon essentiel dans l’extinction de l’incendie, les agriculteurs des Monts d’Arrée ont également un rôle à jouer pour aider à la résilience de nos chères montagnes. 


Ce tragique épisode m’appelle 2 réflexions que j’espère constructives :

 – 1/ Que faire à présent pour nos Monts d’Arrée ?

J’ai pu lire dans les premiers instants de l’incendie une avalanche de plans d’action à grand renfort d’euros pour « rendre les Monts d’Arrée aux bretons » avec des opérations de soutien au patrimoine et de revégétalisation. Sans polémique, je pense qu’il est d’abord nécessaire d’évaluer précisément les dégâts sur la faune et la flore puis d’œuvrer collectivement à accompagner le naturel retour de la végétation – maillon central pour le retour d’une nature sauvage. 

Dans certaines zones, de la lande a brûlé – à l’image des brûlis ancestraux ou des écobuages – sans impacter les croûtes superficielles des sols. Dans d’autres, la tourbe a été brûlée impactant plus fortement les sols. Les réponses doivent être différentes mais le seul chef d’orchestre doit être impérativement le temps long au service d’actions naturelles. 

Je souscris pleinement à l’organisation d’un comité spécial à la restauration des Monts d’Arrée et j’accepterai la proposition formulée par le président du Département qu’un.e élu.e de mon groupe y siège.


– 2/ Comment éviter de tels épisodes et améliorer la résilience de la végétation ?

Éviter les feux me semble impossible. En revanche, éviter des propagations importantes de ces feux me semble être possible par diverses actions peu ou pas employées aujourd’hui :

  • [Proposition 1 : sanctuariser les talus des Monts d’Arrée] J’ai rappelé l’importance de la présence d’agriculteurs à proximité pour aider les pompiers. Je crois aussi en la nécessaire préservation de l’ensemble des éléments de relief comme les talus, trop souvent arrasés pour accroître les surfaces agricoles. Un maintien des talus me semble être indispensable pour ralentir l’action du feu, en plus d’être des refuges naturels pour de nombreuses espèces animales fuyant l’incendie.
  • [Proposition 2 : encadrer plus fortement l’activité humaine dans les secteurs à risque comme les ENS ou la zone Natura 2000]  Les risques envers les habitations ou équipements agricoles ont été réels avec des flammes à quelques dizaines de mètres de maisons, d’exploitations, et même du nouveau méthaniseur du Mougau (dont la présence en limite de zone Natura 2000 et de station de captage d’eau m’étonne toujours autant). La réduction voire la limitation des activités en proximité des landes et de la zone Natura 2000 doit être poursuivie pour réduire les risques majeurs envers les populations.
  • [Proposition 3 : poursuivre et renforcer les partenariats d’exploitation des terres du PNRA et du Conseil Départemental] Les zones naturelles faites de lande ou de végétation rase, sont aujourd’hui pâturées par des élevages grâce à la mise à disposition de terres auprès d’éleveurs du secteur. Là où les élevages sont passés récemment, le feu se propage plus lentement. Néanmoins, ces mises à disposition ne peuvent se faire que sur les terres propriétés du PNRA ou du Conseil Départemental et de manière encadrée. Ces partenariats d’exploitation sont à poursuivre et à accroitre de manière raisonnée.
  • [Proposition 4 : accroître l’acquisition d’ENS dans les Monts d’Arrée pour augmenter le champ d’action du Conseil Départemental] La surface foncière des Monts d’Arrée n’appartient pas exclusivement à des pouvoirs publics. Cependant, il est indispensable de garantir que les plus grandes surfaces à risques soient surveillées, entretenues et inscrites dans une œuvre globale de préservation de la végétation, de la biodiversité et des risques d’incendie coordonnée par l’action publique. Je souhaite donc que l’on puisse accroître l’acquisition d’espaces naturels sensibles par le Conseil Départemental du Finistère (démarche engagée depuis 50 ans en Finistère), pour étendre le pouvoir d’action et de préservation du Département, en lien avec les associations environnementalistes et éleveurs et en conventionnant l’entretien de ces espaces.
  • [Proposition 5 : Réserve citoyenne d’agriculteurs] Mettre en place un mécanisme de « réserve citoyenne » constituée d’agriculteurs, avec toute la pluralité des types d’agriculture et d’exploitation, qui serait mobilisable en cas d’incendie pour accroître de manière très immédiate l’action des sapeurs pompiers, que ce soit dans l’approvisionnement en eau ou en tant que sentinelles pour éviter les reprises. 

Enfin, ces incendies dans le Finistère, en Gironde comme dans d’autres départements et pays, sont de plus en plus fréquents du fait du réchauffement climatique. Ces réflexions que je partage sont à étudier en complément d’actes forts et structurels pour réduire les impacts de ce réchauffement climatique et stopper sa progression.

Nous n’avons plus la possibilité de « regarder ailleurs » pour ne pas nous apercevoir que notre « maison brûle » littéralement.